Jeudi 11 Juillet; l'atterissage, de nuit, sur La Réunion est féerique. Les lumières, scintillantes et surnuméraires, de Saint Denis, posées comme un diadème à flancs de collines, illuminent le firmament depuis le début de la nuit; nous en étions pourtant encore éloignés de quatre-vingt milles.....heureux pays, qui peut se permettre cette débauche de lumens. Ici non plus, les gens qui en ont en charge la gestion ne sont pas pingres avec les deniers publics. Peinardement installé dans la confortable timonerie de Catafjord, je savoure le spectacle de ce décor des milles et unes centrales nucléaires, à travers une douce torpeur dûe au déficit de sommeil. La nuit a été superbe, et la traversée depuis Maurice tout autant. Une douzaine de noeuds de vent par notre travers, c'est bien plus qu'il n'en faut pour atteindre les huit noeuds nécessaires à une arrivée au petit jour. Plus rapides, on arriverait de nuit, ce que je préfère éviter. Aussi, nous avons réduit en conséquence, juste pour le confort.....et c'est drôlement plaisant. Dans quelques instants, Malou sera réveillée par l'apparition du soleil, et nous aborderons bientôt une nouvelle île à visiter.

10 heures du matin: le rêve prend un tour cauchemerdique......alors que tout s'était déroulé sans encombre jusqu'à présent, là, présentement, les choses sont un peu en train de se gâter. Le douanier qui campe, altier, dans le carré, droit dans ses godillots noirs impeccables, est en train de nous expliquer que nous sommes en infraction avec la loi française, et que deux choix s'offrent à nous dans l'immédiat: soit nous acquitter scéance tenante de la TVA sur le canote ( disons quarante mille euros.....amende comprise), ou alors appareiller immédiatement pour des contrées moins françaises! Malou est au désespoir: quatre membres de la famille ont déjà achetés leurs billets d'avion pour venir nous rejoindre pendant leurs vacances......

Pourtant, malgré la vilaine tournure des évènements, ses larmes et sa bonne foi, combinés avec une remarquable humanité et un professionalisme sans faille de la brigade des douanes locale, permettront d'arrondir la difficulté, et de s'acheminer gentiment vers une sortie de brouille acceptable par les deux parties. Moyennant le paiement d'une amende que je n'hésiterais pas à qualifier de "raisonnable", pas plus tard que 17 heures du même jour, tout est réglé et Catafjord a obtenu l'autorisation de stationner dans le port jusqu'à Septembre, sans toutefois en bouger. Oufffff!!!! notre brave pavillon canadien a bien failli nous jouer un sale tour cette fois . Mais bon, grâce à la bonne volonté des gabelous, et à la capacité de persuasion de la Miloude, nous allons pouvoir héberger nos prochains invités et visiter cette île superbe en leur gracieuse compagnie.

Vendredi 12 Juillet: la ville voisine, originalement nommée "Le Port", se présente comme une ordinaire bourgade de province; centre ville moderne et propret, mais alentours plus négligés, le tout situé à un bon kilomètre du quai qui retient Catafjord; de quoi satisfaire notre désir de marche quotidienne minimum. Pierre, le maitre de port, est un type avenant, qui nous offre un accueil des plus souriants. Les bateaux d'Adrien et de Jean-françois sont là, à quai; nous allons probablement les retrouver sous peu.

Dimanche 14 Juillet; l'ambiance n'est pas à la fête, ni nationale , ni même locale. La ville est morne, sans entrain, sale même, et le ciel est gris comme un bâtiment de la Royale. Par bonheur, une gargotte locale, fréquentée uniquement par des gens à la peau plus sombre que la notre, nous offre l'opportunité d'un déjeuner poulet-frites, souriant et sans manière, avec juste la gentillesse spontanée comme on aime. Puis, un peu plus loin, un joli parc de verdure avec cascade reçoit nos déambulations dominicales et digestives. Immondices omniprésents encore, dommage.....

De retour à la capitainerie de la marina, Pierre, nous présente un groupe de constructeurs amateurs.....hebergés dans un hangar voisin, mais, hélas, fort peu aimables.....trop affairés peut-être. Leur bourrier voisine avec un joli Looping 16, presque terminé, en chantier depuis une bonne douzaine d'années....peut-être le proprio en est-il un peu plus avenant....

Sur le chemin du retour, de l'autre coté du port, trois guitaristes font le boeuf, dans le parking de la marina, leurs amplis branchés sur une borne éléctrique pour bateaux.....c'est sympa.

Mercredi 17 Juillet: merci Pierre!

Les consignes douanières reçues lors de notre épique arrivée stipulent bien clairement qu'il nous est interdit de quitter le port, excepté pour déguerpir d'ici, et rien d'autre. Pourtant, grâce à la gentillesse et à l'inventivité de notre maitre de port, depuis six jours que nous sommes à La Réunion, il nous a déjà été donné d'effectuer cinq croisières, pas moins! En effet, le bassin de l'avant-port qui nous accueille, est en ce moment même l'objet d'un dragage, impromptu nous dit-on, et qui jette un grand trouble dans l'organisation du "plan de table". Ainsi donc, d'une manière quasi-quotidienne, nous recevons de nouvelles consignes d'amarrage, nous donnant alors une occasion unique de réaliser une mini-croisière d'environ deux cent mètres à chaque fois. Et, attention, tous les ingrédients qui font la saveur d'une croisière réussie sont présents: découverte de nos nouveaux voisins, apprentissage du mode de vie locale, adaptation au contesque technico-domestique: un coup, pas d'éléctricité, un coup, le quai est un étang, un coup, pas de réception wi-fi, un coup, le voisin nous informe dans la minute de ne pas laisser nos vélos visibles sur le pont car lui-même s'est déjà fait dérober une dizaine de deux-roues (vingt roues, tout de même!!!!). Y a pas à dire, la France, c'est vraiment le pays ou tout est possible. Ceci dit, les meilleures choses ayant invariablement une fin, voici qu'en ce beau mercredi ensoleillé, nous est allouée un emplacement où tout est OK! Pourvu que ça dure.

Mais alors, allons-nous alors sombrer dans le désoeuvrement et l'ennui? que nenni, car la liste des travaux d'entretien comporte encore quelques jolies lignes, en tête desquelles pointe le remplacement des membranes du dessalinisateur qui ont fait largement leur temps.....et justement, leurs remplaçantes ne vont plus tarder à arriver.

Vendredi 19 Juillet: caisse que je vous disais-je?

début d'après-midi: bingo!

après une matinée d'un labeur somme toute plutôt peinard, le dessal est paré à produire sa centaine de litres d'eau douce à l'heure, pour peu qu'on ait pris, au préalable, la précaution de l'alimenter des quelques centaines de watts que réclame sa machine éléctrique. Elle est pas belle la technologie moderne? Inch allah, Bouddha est grand, et Jésus est son pote ad vitam internet.

Dimanche 21 Juillet; ce n'est pas rien de se réveiller avec une séxagénaire dans son lit! Bon, en même temps, dans "séxagénaire", il n'aura échappé à personne qu'il y a "sexe"......l'ignorer serait ballot. Je vous laisse deviner la nature du cadeau d'anniversaire, mais je resterais coi quand à la position; inutile d'insister.

Un bonheur en appelant un autre, c'est en compagnie de notre amie Magalie, de passage à La Réunion, plus une équipe de joyeux lurons de rencontre que nous écluserons quelques verres de blanc en l'honneur de notre vaillante sexigénère.

Lundi 22; la voiture de location est garée sur le quai devant Cataf; le frigo et la cave sont remplis; les outils sont rangés, tout est en place, et les invitées peuvent pointer le bout de leurs valises ( pas sous les yeux.....si possible). A nous les excursions et autres découvertes de paysages espoustouflants.