Jeudi 23 Décembre:

je ne saurais dire à quoi ça tient, mais, décidemment, chaque arrivée dans cette fantastique baie d'Opunohu ( nord de Moorea) nous offre un suave parfum de villégiature. Une des raisons en est sans doute que nous y allons pour prendre un peu de repos après des journées plutôt plus laborieuses qu'à l'ordinaire. En l'occurence, nous venons rejoindre ici quelques bateaux amis pour attendre ensemble le passage du Père Noël polynésien. Ces "vacances" font suite à une semaine de croisière-éclair dans les îles sous le vent en compagnie de nos amis la famille Pouvreau. Nous nous sommes régalés, malgré la briéveté de l'expédition, car Brigitte et Jean-Marc connaissent bien la Polynésie pour l'avoir sillonnée en tous sens avec leurs différents catamarans ( le dernier en date était un fameux "looping16"). Actuellement dans une tranche de vie un peu plus besogneuse, ils se sont offert cette parenthèse dans les îles pour garder le contact avec le monde maritime et la vie au grand air en liberté, ainsi que pour faire découvrir tout ça à leur bru la belle Elodie, enceinte jusqu'aux yeux, trimballant devant elle un bulbe d'étrave de pétrolier.....l'équipage de cette rapide épopée comprenait également Sébastien (l'auteur présumé du bulbe.....), et Thomas, le jeune frère passionné de surf. L 'escapade fut belle, remplie de plongées, repas joyeux, navigations plus ou moins agitées à cause de la remontée au vent, et surf pour Seb et Thomas. Bref, beaucoup de bon temps entre amis, quoiqu'un peu speed par rapport à notre rythme habituel. La météo nous a gâtés, et le retour Huahine/Tahiti a pu se faire sur un seul bord dans la nuit de mardi à mercredi. La lune nous a fait son petit cadeau de Noël en s'éclipsant sous nos yeus ébahis à l'heure de la tisane.

Cette soirée de Jeudi nous retrouve en compagnie de Véronique, Pierre et leurs 3 enfants, dans le cockpit de "Hinapo", le Belize43 qui vient de remplacer leur précédent compagnon de voyage, "Archibald", un sloop en acier à bouchins vifs.....le catamaran, quand on vit en bateau, on y vient un jour ou l'autre, c'est presque incontournable ( je rigole en pensant aux quelques potes inconditionnels du monocoque qui vont me tomber sur le poil à la première occasion à cause de ce que je viens d'écrire, mais je m'en tamponne le coquesix....). Pierre nous présente Arnaud, le très actif responsable du club de voile de Moorea; il est accompagné de Gilles et Karine; et ça c'est une jolie surprise! nous avons connue Karine, institutrice, il y a deux ans en Guyane, et il semblait bien peu probable de la revoir un jour.....c'est la magie du voyage.

Vendredi 24 Décembre:

14 heures: la famille Larès complète, (3 générations), est installée à bord de Catafjord pour prendre une tasse de café grâce à la machine "handpresso" que les babordais nous ont offert pour Noël; ils ont mouillé leur canote en baie d'Opunohu, mais ont élu domicile dans un gîte à terre pour les fêtes....sûrement pour offrir au père Noël un environnement qui lui soit familier ( c'est vrai qu'un polynésien, qu'il soit père Noël ou pape, avec son tour de taille qu'il a, avant qu'il puisse s'introduire dans un canote par une manche à air, y a du boulot!); et puis, peut-être qu'il n'a pas de dinghy, ou qu'on lui a piqué son moteur hors bord, comme c'est arrivé récemment à d'autres ici. C'est donc en terriens qu'ils célèbreront la naissance du petit Jésus sous son cocotier, dans son berceau en bourre de coco doublé de feuilles de pandanus....

19 heures: autour de la table du carré, chacun s'exprime sur son sujet favori du moment; Véro, c'est sa maman qui vieillit....Maia raconte son excursion de la journée en Hobie cat, avec sa copine du club de voile, sous la surveillance bienveillante du beau moniteur adjoint..... Léo, dont l'agilité en kite-surf nous a bluffé tout à l'heure, tente de m'en expliquer le maniement ( rassurant, il me dit :"c'est pas difficile; y a même des vieux qui en font!"; sachant que "vieux", c'est au delà de quarante ans.....); Pierre nous raconte la Papouasie, et nous donne envie d'y passer la prochaine saison d'été austral; nous vivons notre quatrième Noël à bord de Catafjord; encore différent des trois autres; la belle vie!

Dimanche 26 Décembre:

je passe ma matinée à concevoir et dessiner une annexe à moteur éléctrique, en contreplaqué et résine epoxy; je ne suis pas bien certain qu'elle soit réalisée un jour, mais tant pis; je ferais peut-être une maquette en carton au dizième; ce sera toujours ça. Pierre vient prendre un petit café en début d'aprèm et en profite pour me solliciter en recherche de solution pour son chariot de grand-voile qui part en brioche: les axes de poulies sont en train de s'autoriser certaines liberté; une intervention énergique s'impose. Une fois mes directives apparemment bien assimilées, le Pierrot reste livré à lui-même cependant que j'accompagne ma pépette en balade dominicale tout autant que pédestre.....ce n'est pas forcémment la meilleure option. Mon copain Pierre est sans conteste meilleur médecin que mécanicien, au grand dam du chariot de grand' voile, qui se fait pitoyablement "péter la gueule", y a pas d'autre mot! Dès notre retour, je reprends les commandes de l'intervention......jusqu'à la tombée de la nuit; apéro, petite bouffe, dodo, on est déjà demain! La matinée se passe en perçage, découpage, ajustage, et toute cette sorte de choses, tant et si bien qu'à 14 heures, le bazar est à poste, prêt à repartir; c'est Pierre qui a opéré le montage final, et le résultat est très seyant. Epreuve du feu, ce soir: nos amis ont projeté d'appareiller pour Huahine avant la nuit.

Samedi 1er Janvier 2011:

encore une bonne année de bâchée; l'entrée dans 2011 s'est effectuée dans la joie et l'allegresse chez Jean-Marc et Brigitte avec l'aimable compagnie de Nadine et Michel; on a bien rigolé, convenablement arrosé l'évènement, avant de rentrer au cataf aux premières lueurs de l'aube, et dormir peu. Internet nous livre des messages d'amitié du monde entier, un nouveau petit paquet chaque jour; les nouvelles du chariot de GV d'"Hinapo" sont réjouissantes; bref: 2011, c'est bien parti.....sauf peut-être un peu trop de pluie, mais, bon, c'est la saison.

Un sport nouveau est apparu depuis un moment à bord de Catafjord et connait un vif succès, il s'agit de la "pêche au gros rouge". Le coté sportif, pêche au gros, vient de ce que cette activité nécessite un instrument composé d'une longue gaule dont une extrémité est garnie d'une pièce métallique qu'on peut prendre pour un hameçon avec un tant soit peu d'imagination, ou quelques apéros dans le cornet, ou les deux. Le coté "gros rouge" est, quand à lui, lié au fait que la finalité de cette discipline sportivo-culturelle est de capturer des briquettes en carton contenant un liquide issu de la fermentation du raisin ( en tous cas, c'est ce qui est écrit dessus en espagnol); les lecteurs les plus assidus se souviendront d'une visite incongrue reçue il y a plusieurs mois à Fatu Hiva, lors de notre escale dans la féerique "baie des vierges"; un gang d'escrocs grimés nous avait alors extorqué un peu de grisbi, et, pour nous punir de les avoir fait marner toute l'après-midi avant de cracher au bassinet, avaient fini par mettre sous sequestre, dans un coffre du carré, les 40 briquettes de jus de raisin qui constituaient notre cave pour les mois à venir. Le couvercle du coffre en question ayant été dûment scéllé par leurs soins, notre picrate était censé vieillir jusqu'à ce que nous quittions les eaux Polynésiennes.....un petit détail avait alors échappé à l'incommensurable sagacité de ces brillants limiers: le coffre en question possède, à son extrémité, une ouverture de forme circulaire d'environ 200 millimètres de diamètre, cachée derrière une pile de linge, et par laquelle il n'est pas impossible de se servir, disons, simplement en tendant le bras.......Sauf, qu'au bout d'un moment, d'environ plusieurs mois, le bras n'est plus assez long pour aller pécho les briques du fond, car le coffre est profond.... (peut-être pas aussi profond que l'insondable sottise de ceux qui.....), mais bref, je m'égare, ainsi est né cette nouvelle activité de pêche au gros rouge qui consiste bien évidemment à aller capturer la briquette convoitée à l'aide de la gaule pourvue d'une vis métaux de 8X100 à tête hexagonale (on a la tête qu'on peut.....); le petit plus, avec ce sport, c'est qu'en sirotant son petit verre de rouge pendant le dîner, on éprouve la satisfaction du pêcheur qui boulotte le poisson qu'il a sorti de l'eau à force d'habileté et de ruse (sauf que là, la briquette, elle n'est pas spécialement rusée....mais faut mériter quand même).