Mercredi 27 Janvier 7h15: c'est parti! à déraper l'ancre, puis envoyer la grand-voile, l'artimon à un ris, et dérouler le gégène. Sitôt passé l'abri de l'île, la mer est blanche d'écume et le vent souffle vingt-cinq noeuds, à cent trente cinq degrés de notre route; nous sommes très toilés et le canote glisse sans peine à une douzaine de noeuds dans la mer peu formée. Plus de onze noeuds de moyenne pour les cinq premières heures de navigation.....et dix noeuds sur l'ensemble des 85 milles qui nous amènent dans la baie de Benao sur la côte sud du Panama; sympa! seul bémol, un poisson surdimensionné a emporté mon hameçon et le beau leurre tout neuf récemment acquis pour 10 dollars; la sale bête! Le mouillage de Benao n'est pas du genre encombré....un seul autre bateau y a pris refuge devant la grande plage de sable gris. Trois petits établissements aux basses toitures de chaume hébergent quelques touristes et surfeurs; il y a peu de houle en ce moment, et c'est très confortable ici, tout autant que venteux d'ailleurs; ça nous convient tout à fait, car ça fait tourner l'éolienne et chasse les moustiques; le fond est de bonne tenue, alors, que demander de plus? Le soleil a viré à l'orange pour faire son intéressant avant de tirer sa réverence ( le pôvr, que voulez-vous qu'il tire d'autre?.....)

Jeudi 28 Janvier: quand je repense à c't'andouille de poisson qui m'a piqué mon beau leurre tout neuf hier, moi qui n'en achète jamais d'habitude; il doit avoir l'air malin maintenant avec ce gros hameçon double planté dans les chicots, et une barbichette rouge en plastique qui dépasse de chaque coté; ridicule! En plus, ça va pas être plus commode pour se rincer la dalle; quand à séduire une poissonne avec ce look, il va pouvoir se la mettre sur l'oreille; et comme il n'en a même pas.....disons sur la caudale alors; en tout cas, pour la gaudriole, ce sera que dalle! ça lui apprendra à piquer les affaires des autres.

Ce matin nous quittons le mouillage, où ça a bien soufflé cette nuit, avec une voilure de papys: génois seul; et nous nous en réjouissons rapidement, car le vent est établi à 28 noeuds, et les surventes atteignent fréquemment 35, avec même une fois 39! mais ça ne dure pas; une petite période de calme plat/moteur fait place à 12 noeuds de vent de sud; l'opposé du début de journée! et pour finir, le vent réapparait au nord-nord-ouest, suffisamment vigoureux pour rendre intenable le mouillage préssenti! c'est encore les Yanmars qui sauvent le coup, en nous permettant, avec l'appui du génois, de parcourir rapidement les vingt milles qui nous séparent de l'île Sebaco et son excellent abri. Arrivée comme dans un rêve: juste à la nuit tombée, la lune nous offrant l'aide de sa douce lumière pour aller poser l'ancre au fond de l'anse. Mais, je vous ai gardé le meilleur pour la fin; la cerise sur le bateau! La perte, hier, de nos leurres tout neufs, est lavée! Nous avons pris aujourd'hui, un mètre quatre vingt de poissons, soit, une dorade coryphène de un mètre sur la ligne à Malou, et une bonite de quatre-vingt centimètres sur la mienne, grâce à un leurre fabriqué ce matin même avec un morceau de vieille écoute. Avec ça, c'est au moins trois semaines de barbaque assurées.

Plusieurs groupes d'îles parsèment le sud du Panama, dans l'immense golfe délimité par la Punta Naranjo à l'est, et la Punta Burica à l'ouest. La plupart sont des merveilles inhabitées, un peu vallonnées, pourvues de plusieurs bons mouillages et recouvertes d'une végétation exhubérante. Certaines sont dotées de basses maisonnettes noyées dans la verdure comme autant de chambres d'hôtes éxotiques, accueillant des vacanciers en mal de dépaysement "authentique". Mouillés dans une de ces baies de carte postale, trois gosses de riches, insouciants et bruyants, traversent en canoë ce paradis, inconscients de l'immensité de leur privilège....

lundi 1er Février: il est 8h30, la mer est plate et molle. Au loin, comme un trompe l'oeil décoloré au mur de l'horizon, le volcan Barù, quatre mille mètres de haut, barre la route à l'alizé de l'Atlantique nord; et donc, pas de vent! Cap au 290, moteur babord à deux mille deux cents tours/minute, nous quittons la dernière de ces îles du sud Panama, ; il me semble possible de passer des semaines ici, vagabondant d'un endroit de rêve à un endroit magique, le canote posé à la surface d'un aquarium géant, l'eau à 28°c permettant de renouer avec la délicieuse habitude du bain quotidien (amen!). Hier, Malou s'est trouvée nez-à-nez avec une tortue marine à trente mètres du bateau, et moi, avec une belle raie noire à tâches blanches ( je me suis aussi retrouvé nez-à-nez avec la belle raie de Malou aussi, mais ceci est une autre histoire qui ne sera pas narrée ici, inutile d'insister.....).

mardi 2 février; escale à puerto Armuelles pour accomplir les formalités de sortie du Panama.....quelle lavement! chiant et coûteux. Bah, demain , on change de crémerie. Le Costa Rica est là, derrière la péninsule de Burica, qui semble nous tendre ses petits bras musclés......l'escale la blus belle, c'est toujours celle qu'on n'a pas encore faite. Hasta luego.