C'est l'heure de "la belle lumière". Nous, tranquillement installés dans le cockpit.; le ciel, complètement dégagé a abandonné son bleu d'azur pour adopter celui, un peu grisé, de l'acier neuf, et la mer, à peine ridée par d'éparses vaguelettes, a fait de même (si vous pigez pas tout, vous bilez pas, moi non plus; c'est passe que c'est de la poésie.....on peut pas tout capter). La ligne d'horizon, plus foncée, trace un trait derrière nous, rejoignant Roseau, capitale de la Dominique, et l'extrémité sud de l'île. Malou prépare une salade de fruit avec les bananes et les mangues achetés il y a à peine un quart d'heure à une brave dame qui somnolait derrière son étal au bord de la route. Quelques poissons, pourchassés par un prédateur, griffent la surface de la mer dans leur fuite épérdue; le grand paquebot a quitté son quai et sa silhouette un peu pataude meuble l'horizon. Ca y est, le disque solaire a coulé au bout de la mer, tombé derrière peut-être....mais il y a sûrement un fil...... en sécurité...... je suis confiant qu'il va réapparaitre de l'autre coté demain matin.....mais en tout cas, la "belle lumière" c'est fini pour aujourd'hui; place à la nuit. Un bar commence à diffuser sa musique "boum-boum"; des fumées s'élèvent de quelques jardins; un feu a été allumé sur la grève de galets ( les seules grèves connues en Dominique, contrairement aux îles voisines françaises......forcémment, leur PIB par habitant est dix fois inférieur......pourquoi se plaindraient-ils?...... scuzez, ça m'a échappé). Catafjord tire doucement sur le mouillage qui nous a été alloué par Desmond, en échange de 10 dollars; avant l'amarrage, on parlait de dollars "E.C." ( Est Caribéan ), mais, une fois amarrés, seuls les US dollars convenaient! magique non? ça a bien agacé Malou, mais on est restés quand même. L'eau est d'une rare limpidité, et le paysage magnifique et très paisible, alors.....Et puis, la journée a été bien bonne. Partis à 9 heures des Saintes, un autre endroit "de rêve", l'alizé nous a gratifié de son souffle encore vigoureux pour nous permettre d'arriver ici à la voile avec à peine une heure de moteur, et, à bonne vitesse en plus, ce qui est toujours très satisfaisant. Hier, nous avons dit "au revoir" à nos chers babordais.....quelques larmes ont embrumés quelques yeux, dégoulinées sur les joues qui étaient dessous.....puis séchées, et le voyage continue après ces deux semaines en Guadeloupe, particulièrement agréables.

mercredi 10 juin; charmante escale à St Pierre de Martinique. La ville, toute de constructions basses, s'étire le long du rivage de sable noir. S'il est noir, c'est qu'il a de bonnes raisons de l'être; évidemment car c'est plutôt volcanique dans le quartier. Partout, de vieilles pierres témoignent encore du passé prestigieux de cette ville qui a été, pendant de nombreuses années, la plaque tournante du commerce Caraïbe. Puis, la terrible éruption de la montagne pelée en 1902 a mis un terme à la prospérité de cette agglomération en ravageant tout, extérminant l'intégralité de la population, à l'exception de l'unique prisonnier qui s'est trouvé "protégé" dans son gîte carcéral......étrange facétie du destin qui épargne la seule personne que la populace avait jugée indigne de liberté; soit y a pas de justice, soit ce type ne méritait pas d'étre mis en taule.......ou peut-être est-ce un peu des deux.....Sur la place publique, un immense manguier distribue ses fruits à qui veut bien se pencher pour les ramasser. Un pêcheur traine sa ligne à petite vitesse dans sa barque en bois rouge et bleue, balançant son appât avec un geste de jouet mécanique inlassablement reproduit ( disons comme avec une pile duracell si vous voyez le genre.....). Le club de plongée local a chargé son troupeau d'otaries vacancivores à bord de son gros gros "zod", et les voilas partis jouer les "cousteau" du dimanche sur quelque épave, c'est pas ce qui manque, y en a plein par ici. Bref, la vie s'écoule tranquillement en rade de Saint Pierre de Martinique.

Demain, pélerinage à l'anse Mitan.